la force de l'animal à y faire de profondes rainures. On peut ajouter au nombre des signaux, les traces des sabots (fort nombreuses, l'animal se déplaçant continuellement) et l'odeur des glandes interdigitales. Nous constatons donc que le mâle utilise de nombreux artifices afin de s'acquérir une partie de la forêt, aire dans laquelle il aura le monopole de l'amour.

C'est sur ces territoires, qu'attirées par le raire des mâles et poussées par l'instinct sexuel, que les femelles se retrouveront pour former le harpail constitué par une dizaine de daines en général. Pour s'assurer la possession des femelles, le mâle doit défendre son territoire face aux rivaux. Néanmoins, il s'agit de démystifier un peu la cruauté et la dimension de ces combats rituels qui parce qu'étant impressionnants ont été largement exagérés. L'idée que l'on se fait de ces combats sans merci dans lesquels les mâles se ruent courageusement contre n'importe quel rival est fausse, tout comme cette autre idée généralement admise que, si le combat, besoin vital, ne se réalise pas, le mâle n'hésite pas à éventrer les femelles. Cette réaction peut à la rigueur être observée sur des animaux tenus en captivité et donc quand le mâle n'a jamais aucun rival, mais elle ne l'est pas dans le cas des animaux libres. D'autre part, pour démentir l'opinion qui consiste à dire que le daim fait preuve d'héroïsme lors des combats rituels, il suffit de préciser que l'animal montre beaucoup plus de bravoure quand il est seul que devant un rival ou même que devant les daines, préférant souvent passer son humeur belliqueuse sur un buisson que sur son congénère.

Il faut en plus préciser qu'il existe des réactions caractéristiques, antagonistes de l'agressivité intra spécifique. La fuite engendrée par le raire en est une. Une autre est l'abstention à la prétention pour un mâle faible, de disputer un territoire à un rival physiquement plus fort que lui. Les combats rituels effectivement menés - et ils existent bien entendu - sont assez anodins par rapport à ceux du cerf et n'ont lieu que lorsque se trouvent en présence deux mâles de même âge et de force sensiblement égale. Nous avons même pu constater que les vieux mâles semblent négliger les jeunes, les autorisant à séjourner sur leur territoire. Néanmoins, quand deux mâles de même force se disputent la même place, il y a nécessairement combat auquel assistent d'ailleurs toutes les femelles du harpail.

De tels combats ne se terminent alors que par la défaite et la fuite ou parfois même la mort de l'un, rarement des deux, des antagonistes. Le combat commence toujours par certains mouvements rituels destinés à intimider l'adversaire. Les mâles trottent côte à côte se donnant quelques coups d'andouillers relativement faibles ou bien ils enfoncent leurs bois de toutes leurs forces dans le sol qu'ils déchirent d'un mouvement en arc de cercle, le cou arc-bouté, ou encore, ils baissent la tête, les bois en avant et grattent le sol de leurs sabots. Si l'un des deux adversaires considère que l'autre est le plus fort, il s'enfuira, abandonnant dans sa course les femelles et la place du rut. Il est à noter que le mâle vainqueur ne poursuivra jamais ou que très rarement son adversaire en fuite au delà des limites de son territoire.

Néanmoins, malgré tous ces rituels d'intimidation, il arrive parfois que ceux-ci ne déterminent pas la fuite de l'un des deux antagonistes. Le véritable combat s'engage alors. Les deux mâles se disposent face à face, à quelques mètres d'intervalle, la tête baissée, le museau effleurant le sol, de manière à placer bien en avant les bois et surtout les andouillers qui sont leurs armes redoutables de par leur forme. Ils se précipitent alors l'un sur l'autre, le massacre en avant. Les chocs sont parfois si violents qu'ils parviennent à briser des andouillers ou même des merrains. Le daim cherche toujours à atteindre son adversaire par le travers. S'il y parvient c'est la blessure grave ou même la mort.

Heureusement, la parade de la tête réussit presque toujours, si bien que le combat se résume dans la majorité des cas à entrechoquer les bois.

 

Un combat en vidéo

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